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Béatrice : « Mes mains sont abimées par le travail répétitif en IAA »

Publié le 08/03/2023

Béatrice est née en 1966. Elle a commencé à travailler en 1986, avec des petits contrats successifs. Depuis octobre 1992, elle travaille dans une usine où elle est conditionneuse.

Vous avez certainement déjà mangé les cacahouètes que je mets en sachet… Eh bien, sachez que ce travail réduit mes capacités de préhension petit à petit !

Je travaille à la chaîne et je mets en sachets de 550g à 1,5 kg 8 tonnes de cacahouètes par jour !

Depuis 30 ans, je suis en équipe du matin, c’est-à-dire que je travaille de 5h du matin à 13h sur une période de quatre semaines avec deux semaines où je travaille 6h le vendredi et deux semaines où je ne travaille pas le vendredi.

Une majorité de mes collègues travaille en équipe de 2/8 mais certains ont, comme moi, choisi le travail du matin ou de l’après-midi. Des salariés ont choisi, eux, de ne travailler que la nuit.

Nous sommes 180 salariés dans l’entreprise avec une majorité d’hommes.

Mon travail a réduit la mobilité de mes mains, j’ai de l’arthrose aux deux mains et ceci à cause des gestes répétitifs depuis 30 ans.

Je ne suis pas la seule : mes collègues, pour la majorité, ressentent, eux aussi, des maux qu’ils acceptent… car où iraient-ils travailler s’ils partaient ?

Dans mon entreprise, il y a peu de prévention pour réduire les conséquences du travail à la chaîne, une ou deux interventions avec la CARSAT mais pas avec la prévoyance, pourtant ces actions de prévention seraient profitables aux salariés.

Chez nous, pas d’échauffement à l’arrivée au poste, on remplace le collègue qui rentre chez lui et on doit suivre la cadence de travail.

Nous avons une pause durant notre temps de travail, mais le temps de se reposer un peu et le retour au rythme de travail réveille les douleurs qui s’étaient un peu calmées… Certains collègues me disent quelques fois que s’ils avaient le choix, ils ne prendraient pas de pause pour ne pas ressentir cette douleur qui est violente quand elle reprend…

mains de femme fatiguées

Je viens de démissionner de mes fonctions d’élue CSE. Je ne manquais pourtant pas de motivation. Mais ce n’est pas facile d’entendre les demandes des salariés qui passent leur colère sur les délégués et qui ne sont jamais satisfaits sur leurs conditions de travail ou sur les décisions prises par un employeur qui, même s’il fait des efforts, la réalité est là : le travail est usant.

Le 7 mars, je voudrais que le pays s’arrête vraiment, que personne ne bouge, surtout ceux qui vivent mal au travail… Cela donnerait à réfléchir à tous ceux qui veulent que l’on travaille jusqu’à 64 ans.

Le projet de réforme des retraites est un contre sens pour moi. Il n’y a pas de prise en compte du travail réel des personnes, nous sommes des humains pas des robots et on doit suivre le rythme des machines…

Il est difficilement acceptable qu’un travail rende malade et pourtant c’est le cas de nombreux emplois.

Je suis désappointée quand je pense que je vais devoir travailler plus longtemps alors qu’à mon âge, je suis déjà fatiguée, à la fois physiquement et moralement…