Patricia, salariée d’un service de remplacement : « Les salariées de la production agricole : des salariées essentielles à l’agriculture »

Publié le 03/03/2022

A l'occasion de la journée internationale des droits des femmes (le 8 mars), portrait d'une militante CFDT Agri-Agro... essentielle !

Patricia et son métier

Je suis salariée d’un service de remplacement qui compte plus de 100 salariés en CDI dans une grande région de production porcine. Un service de remplacement est une structure professionnelle qui propose aux agriculteurs, sur un territoire donné, des salariés pour les remplacer en cas de besoin particulier. Cela fait 12 ans que je travaille dans ce secteur. Nous intervenons à la demande des éleveurs dans des situations de remplacement ou de surcroît de travail.

Mon métier est très peu féminisé.

J’ai un parcours un peu atypique. Je suis titulaire d’un bac STAV (Sciences et technologies de l'agronomie et du vivant). Ensuite j’ai commencé un BTS "production animale" mais je ne trouvais pas l’aspect concret et pratique dans la formation : j’ai donc arrêté mes études. J’ai fait de la formation aux côtés du premier agriculteur qui a accepté de me donner une chance, il m’a appris les bases du métier.

En travaillant dans un service de remplacement, il faut avoir de très bonnes aptitudes d’intégration et d’adaptation. Un salarié doit pouvoir intervenir dans de nombreux élevages avec des missions qui peuvent aller de 2 jours à 4/5 mois selon les besoins. Les techniques et les pratiques professionnelles sont changeantes d’une exploitation à une autre : nous, salariés des services de remplacement, devons être très observateurs et très attentifs à ce que désire l’éleveur.

Etre femme salariée de la production agricole comporte parfois des particularités. Tout dépend de l’agriculteur chez qui on vient travailler. Certains ont un « sexisme bienveillant » (si l'on peut dire !). Quand un agriculteur demande une intervention, on lui propose d’abord une salariée : s’il répond que le travail est trop difficile, pas fait pour les femmes… On le laisse réfléchir. En général, il rappelle et accepte l’intervention d’une femme s’il a vraiment besoin d’être aidé sur son exploitation. Cette technique permet à la fois d’imposer les collègues femmes et de réguler les demandes.

L’accueil dans les exploitations n’est pas toujours facilité. Certaines exploitations ont prévu des locaux adaptés pour les femmes et pour les hommes mais dans quelques cas il n’y a ni salle de repas, ni espace pour se changer ni même de toilette... pourtant la règlementation le prévoit et le service de remplacement le rappelle à chaque contact.

Dans mon entreprise il y a un accord égalité professionnelle, il n’y a pas de différences entre les rémunérations des femmes et des hommes à poste équivalent. Pourtant des spécifiés dues à notre activité avec les animaux amènent des différences.

J’ai une petite fille âgée de 2 ans et demi maintenant. Durant ma grossesse j’ai dû m’arrêter à 3 mois de grossesse. Nous manipulons des produits phyto pharmaceutiques quand les truies doivent avoir des portées ; ce sont des produits que l’on doit injecter. Il y a des risques pour les futures mamans lors des manipulations. C'est pourquoi le médecin du travail de la MSA m’a arrêtée à 3 mois de grossesse.

J’éleve seule ma fille et si, auparavant, j’acceptais d’avoir des horaires très flexibles, maintenant j’ai des contraintes et je veux pouvoir avoir le temps de vivre des moments importants le soir avec ma fille. Les éleveurs chez qui j’interviens sont très compréhensibles, j’aménage mon temps dans la journée pour finir à des horaires qui me conviennent et qui satisfont l’agriculteur.

Patricia et le 8 mars

L’agriculture se veut un secteur attractif pour les futurs chefs d’entreprise et pour les salariés.

Il faut continuer de se faire confiance, entre salariés et non-salariés, et surtout entre hommes et femmes. Je mets hommes en premier car ce sont eux qui doivent faire un chemin plus long que nous, les femmes. Ils partent de très loin pour certains.

J’ai des amies cheffes d’exploitation éleveuses qui sont très agacées quand un livreur vient leur demander où est le patron... Quand elles répondent "c’est moi", il ya presque toujours un petit pas de côté !

Pour les salariées c’est tout aussi complexe, nous devons toujours démontrer plus que les hommes nos compétences professionnelles qui ne sont jamais reconnues sur le papier et toujours testées sur le terrain.

Alors le 8 mars je répèterai à tous : "Je suis une travailleuse essentielle pour la continuité de l’agriculture française."